Des négociations à couteaux tirés
Le téléphone rouge crépite entre Washington et Séoul. Alors que le sablier des surtaxes se vide, les diplomates coréens proposent un « accord global » pour éviter d’être happés par la lame de 25 % sur l’acier et l’aluminium. Les Américains, sourire californien en façade, aiguillonnent pourtant pour un pacte rapide : dans l’ombre des négos, Detroit rêve déjà de muscler ses pick-ups sans concurrence asiatique. Impossible de ne pas penser à la saga NAFTA des années 1990 : même suspense, même cocktail de lobbyistes, mais sur fond d’avions taxis électriques et de semi-conducteurs plus rares que les vinyles originaux de Daft Punk. Difficile de croire à une issue douce : un compromis retarderait la douleur plutôt qu’il ne la guérirait. Pendant ce temps, Bruxelles surveille la partie comme un voisin curieux au-dessus de la haie : si Séoul obtient une dérogation, Paris et Berlin exigeront la même caresse tarifaire.
Le grand plongeon dans les abysses
En signant l’ouverture des grands fonds à l’extraction minière, Donald Trump rompt avec la doctrine onusienne selon laquelle les océans sont « patrimoine commun de l’humanité ». Que dirait Cousteau en voyant les nodules polymétalliques devenir des jetons de casino géostrategique ? Les pro-mines y voient le Graal pour sécuriser nickel et cobalt, indispensables aux batteries qui font vibrer les Tesla aussi bien que les longboards électriques. Les ONG, elles, alertent sur la destruction d’écosystèmes encore plus mystérieux que les théories de Kubrick. Le Clarion-Clipperton Zone pourrait devenir le Far West du XXIᵉ siècle : à la place de John Wayne, des robots télé-opérés et des hedge funds dopés à la caféine. La bataille ne fait que commencer ; le sabre juridique de l’Autorité internationale des fonds marins vibre déjà dans son fourreau.
Bleu business en France : baromètre morose
Pendant que les géants s’affrontent, l’Hexagone ressasse ses propres états d’âme. L’indice de climat des affaires reflue à 96, signe qu’une partie du tissu entrepreneurial garde la mine aussi grise qu’un ciel breton en novembre. Paradoxe : l’industrie et les services remontent timidement la pente, mais le bâtiment piétine, victime d’une hausse des taux qui refroidit bétonniers et promoteurs. Dans les cafés du 11ᵉ arrondissement, les jeunes freelances SEO – oui, ceux qui parlent davantage de backlinks que de Baudelaire – guettent les commandes comme des Parisiens les premiers rayons de mai. Les données de l’Insee rappellent un refrain connu : sans perspectives de marges, pas de frénésie d’embauches. Or la génération Z réclame sens, équité et télétravail de Helsinki à Biarritz. L’entreprise française devra conjuguer compta d’épicier et audace de graffeur pour séduire ces talents nomades.
Safran : ascension en plein orage
Au milieu du tumulte, Safran s’offre un looping de haute voltige : +13,9 % de croissance organique, un moteur LEAP qui ronronne, et un management qui jure atténuer « l’impact économique des droits de douane ». À l’image de Top Gun : Maverick, le motoriste français prouve qu’on peut ressusciter de vieilles gloires – ici l’aviation civile – en y injectant efficacité énergétique et IA prédictive. Les analystes applaudissent, les marchés sifflent de plaisir : action en hausse de 2,4 % à l’ouverture, façon standing ovation à Cannes. Reste un défi : si la guerre tarifaire s’intensifie, le joint-venture CFM International aura besoin d’autant de diplomatie que de titane. Les carnets de commandes d’Airbus A320neo et de Boeing 737 MAX ne supporteraient pas une querelle aux allures de Clash des Titans.
Ici, pas de rideau ; seulement l’invitation à ne pas laisser les dés du commerce international retomber toujours du même côté. Les jeunes pousses, les ingénieurs rêveurs, les créatifs branchés savent que l’avenir appartient à ceux qui osent bousculer les règles – quitte à plonger en eaux profondes ou à réécrire le tarif douanier comme on samplait le punk dans le hip-hop des années 1980. C’est le moment de choisir : subir la tempête ou tenir la barre.