Quand l’olympisme flirte avec la caméra
Des chronos stratosphériques à Londres en 2012 jusqu’à l’or collectif aux JO de Paris 2024, Florent Manaudou incarne depuis plus d’une décennie le mythe moderne du héros sportif. Le voilà désormais prêt à troquer le bonnet de bain pour le clap de tournage en intégrant la saison 2 d’« A priori », la comédie policière menée par Bruno Salomone et Lucia Passaniti sur France 3. Tournage prévu en juillet : la même rigueur que dans un stage altitude, mais sous les projecteurs.
Dans l’Hexagone, l’athlète‐acteur n’est pas une bizarrerie – qu’on se souvienne d’Éric Cantona dans Looking for Eric ou de Zinédine Zidane dans le clip de Cassius – pourtant, voir un nageur franchir le Rubicon médiatique provoque une vague d’attente enthousiaste. Le bassin olympique n’avait encore jamais enfanté d’interprète pour le prime‐time national : un saut dans l’inconnu aussi vertigineux qu’un départ dos‐crawlé sans mur.
Danse, dépression et renaissance cathodique
Quelques semaines plus tôt, le colosse de 34 ans frôlait la victoire dans « Danse avec les stars », rappelant qu’un corps forgé pour le sprint peut aussi valser avec grâce. Mais derrière la paillette, un autre récit s’écrivait : celui d’une dépression post‐JO, racontée sans fard dans un documentaire M6 aux côtés de Yannick Noah et Camille Lacourt.
À l’ère des réseaux où la vulnérabilité s’affiche en stories éphémères, cette confession construit un pont entre podium et canapé, brisant le vieux cliché du sportif invincible. Quand la santé mentale entre dans le salon, la victoire est double : elle déstigmatise et elle fédère. Reste à voir comment la fiction saura transformer cette authenticité en profondeur dramatique plutôt qu’en simple atout communication.
La série « A priori » : terrain de jeu ou planche savonneuse ?
France Télévisions mise gros : attirer la génération TikTok qui zappe plus vite qu’un papillon sous caféine. Dans un paysage où Lupin règne sur Netflix et où Validé a prouvé qu’un casting musclé peut conquérir le streaming, « A priori » devra vibrer aussi fort que le départ d’une finale olympique.
Aux côtés de Bruno Salomone, as du comique à la française, Manaudou devra montrer qu’un champion se réinvente au‐delà du storytelling sportif. Le danger ? L’écueil du cameo gadget, vu mille fois dans les sitcoms US. L’espoir ? Un personnage « proche de l’héroïne flic », promet la production : l’alchimie entre muscles et intrigue pourrait rappeler la tension savoureuse de True Detective, version bassin d’entraînement et charme tricolore.
Révolution pop ou simple effet de vague ?
Ce virage artistique illustre la mutation culturelle d’une époque qui célèbre la transversalité. Les frontières entre palmarès, parquet de danse et plateau de tournage se brouillent, comme les genres musicaux s’hybrident de Dua Lipa à Stromae. Certains puristes crieront à l’opportunisme. Pourtant, pourquoi cantonner le talent dans un seul couloir ?
Dans le miroir d’un pays qui se cherche des héros multifacettes, l’entrée de Manaudou dans la fiction résonne comme un manifeste : cultiver l’audace, explorer d’autres piscines, se réinventer avant que la gloire ne se fane. Le public jeune, habitué au zapping identitaire d’Instagram, jugera sur pièce ; mais déjà, l’initiative claque comme un plongeon en finale olympique.
Le rideau se lève bientôt et les caméras tourneront : que les sceptiques se tiennent prêts, car le chrono de cette nouvelle course s’annonce implacable.